Activités photovoltaïques et sociétés agricoles
L’installation de panneaux photovoltaïques sur les toits des bâtiments d’exploitation, reste attractive.
Cependant, la question se pose de savoir comment harmoniser un tel projet avec une société agricole.
Par nature, l’activité de production d’énergie photovoltaïque doit être considérée comme non agricole mais comme une activité commerciale. En principe donc, cette activité n’est pas compatible avec l’exercice d’une activité agricole.
Cependant, l’implantation de panneaux photovoltaïques sur un support immobilier a vite mis en avant l’intérêt des bâtiments agricoles pour ce faire.
Cette incompatibilité entre le support agricole et le fait que cette activité ne le soit pas a conduit la Loi à créer un principe d’exception destiné à permettre les activités photovoltaïques- lorsqu’elles sont implantées sur un bâtiment agricole.
La loi dite « Grenelle 2 » de 2010, a posé un principe voulant que « toute personne morale peut, quelle que soit la mission pour laquelle elle a été constituée, exploiter une installation de production d’électricité utilisant l’énergie radiative du soleil dont les générateurs sont fixés ou intégrés aux bâtiments dont elle est propriétaire. […] il en est notamment ainsi de toute société civile mentionnée au titre II du livre III du Code rural et de la pêche maritime, y compris lorsque l’exploitant agricole dispose des bâtiments dans le cadre d’un bail rural ».
Cette précision permet donc d’écarter tout doute sur la possibilité de faire une activité photovoltaïque ayant pour support un bâtiment agricole. Ainsi, un GAEC, une EARL, une SCEA ou un GFA peuvent donc installer des panneaux photovoltaïques sur des bâtiments dont ils sont propriétaires et les exploiter.
Attention, il ne s’agit pas là d’une extension de la définition juridique agricole, mais d’une exception à cette définition limitée. Cela veut donc dire que des sociétés peuvent exploiter les panneaux photovoltaïques installés sur des bâtiments dont elles sont propriétaires sans perdre leur qualification de société civile ni leur statut juridique particulier.
Attention toutefois à l’objet social, tel que ce dernier est rédigé dans les statuts : une société civile qui développerait une activité photovoltaïque devra, au préalable, prendre la précaution de modifier son objet social. En effet, une personne morale ne peut agir que dans le cadre de son objet légal et statutaire.
De plus, par principe, « dans les rapports avec les tiers, le gérant engage la société par les actes entrant dans l’objet social ».
Il est également à noter qu’il peut être demandé un numéro SIRET d’établissement secondaire pour distinguer le compteur de l’installation photovoltaïque de celui du compteur général de l’exploitation.
La compatibilité avec l’agrément des GAEC
Au vu de la mise en place de l’exception citée plus haut, un GAEC n’entourerait pas de refus d’agrément s’il venait à faire une telle activité. Ce principe a été affirmé pour la première fois en 2011 et rappelé dans une instruction en 2014.
Sur ce même fondement, en cas de contrôle, une telle activité, contrairement aux autres activités commerciales, ne saurait être considérée comme devant conduire à un retrait d’agrément.
Attention à une telle activité en présence d’un GFA
Un GFA peut être exploitant : dans ce cas, il sera traité comme une SCEA ou autre au regard de l’activité photovoltaïque et pourra poursuivre cette activité avec des panneaux installés sur les bâtiments qu’il détient.
Cependant, outre les cas où il ne peut être exploitant, un GFA est généralement constitué dans un but de préparation de la transmission successorale, avec des abattements fiscaux avantageux.
Ce régime d’exonération est notamment subordonné, entre autres, à ce que les statuts du GFA lui interdisent le faire-valoir direct. En d’autres termes, pour bénéficier des exonérations en matière de droits de succession dans le cadre d’un GFA, ce dernier doit être uniquement bailleur d’immeubles ruraux grevés d’un bail rural à long terme.
Dans ces conditions et malgré le visa de la loi de 2010 qui, pourtant, cible les GFA sans distinguer selon que ces derniers soient bailleurs ou exploitants, il ne sera pas possible de pouvoir exploiter des panneaux photovoltaïques au sein d’un GFA non exploitant dont la vocation serait la transmission patrimoniale avec ouverture au régime d’exonération des droits de mutation à titre gratuit.
Attention également en présence d’un bail rural
Nous rappelons donc ce que dit la loi de 2010, laquelle autorise l’installation et l’exploitation de panneaux photovoltaïques sur des bâtiments dont une société est propriétaire, « y compris lorsque l’exploitant agricole dispose des bâtiments dans le cadre d’un bail rural ».
Sur le principe, nous pourrions donc légitimement penser qu’une exploitation de panneaux photovoltaïques installés sur un bâtiment pris à bail seraient complétement valable.
En réalité, des questions subsistent, puisque le statut du fermage n’a, quant à lui, pas été changé à la suite de la loi de 2010…
Le bail rural vise « toute mise à disposition à titre onéreux d’un immeuble agricole en vue de l’exploiter pour y exercer une activité agricole ». Or, comme nous l’avons vu, la production d’électricité photovoltaïque n’est juridiquement pas agricole.
Le bailleur pourrait donc être tenté de remettre en cause le bail, voire de le faire résilier, si une telle activité était réalisée, sans qu’elle n’ait été expressément prévue et autorisée dans le bail.
Outre cette question, se pose également le problème de ces installations en fin de bail : qu’en sera-t-il d’une éventuelle indemnisation ? Les améliorations apportées par le fermier ne lui permettent d’être indemnisé par le bailleur en fin de bail que si elles ont été réalisées dans le respect des prescriptions du statut du fermage.
L’installation de panneaux photovoltaïques constitue-t-elle une amélioration indemnisable ? rien n’est moins sûr…, de même que le mode de calcul envisagé par le Code rural pour l’indemnité ne saurait être applicable à ce type d’investissement.
En l’état, nous n’avons que trop peu d’éléments pour pouvoir approuver l’installation de panneaux photovoltaïques sur un bâtiment qui serait grevé d’un bail.